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Nutrivigilance Connaissez-vous le dispositif national 
de signalement ? Non classé

Nutrivigilance

Nutrivigilance

En France, coexistent les dispositifs de matériovigilance, de pharmacovigilance… mais aussi, plus discret, celui de nutrivigilance 
dont la mise en œuvre a été confiée à l’Anses en juillet 2009 par la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST). À travers lui, les professionnels de santé sont invités à signaler les effets indésirables liés à la consommation de compléments alimentaires ou de nouveaux aliments.

 

 

Après quatre ans de fonctionnement, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a présenté le premier bilan de son dispositif de nutrivigilance à l’occasion d’un point presse organisé à Paris, le 
8 octobre. « Ce système de veille sanitaire vise à faire remonter les signalements d’effets indésirables liés à la consommation de compléments alimentaires, d’aliments ou de boissons enrichis en substances à but nutritionnel ou physiologique (vitamines, acides aminés, extraits de plantes, etc., N.D.L.R.), de nouveaux aliments et nouveaux ingrédients comme les phytostérols, la pulpe de baobab, la gomme de guar ou le jus de noni et, enfin, de produits destinés à l’alimentation de populations particulières présentant des besoins nutritionnels spécifiques telles que les personnes âgées, les patients souffrant d’intolérance alimentaire ou encore les femmes enceintes », a rappelé, en préambule, le Dr Marc Mortureux, Directeur général de l’Agence. L’objectif est d’améliorer la sécurité des consommateurs face à une croissance exponentielle de produits revendiquant des propriétés telles que le renforcement du tonus et des défenses immunitaires, la chute du taux de cholestérol, l’amélioration de la digestion, la perte de poids ou encore le ralentissement de la chute des cheveux.

 

« Bien que la sécurité sanitaire des aliments soit très encadrée et surveillée, ces nouveaux produits, souvent perçus comme anodins par les consommateurs, peuvent toutefois, dans certaines circonstances, les exposer à des risques qu’il faut être en mesure d’identifier et d’évaluer pour les prévenir », souligne le Dr Marc Mortureux. Ces « circonstances » sources de risque peuvent être liées au profil physiologique de chaque consommateur, aux doses ingérées voire aux associations de ces substances entre elles ou avec des médicaments, par exemple. Les seniors, souvent fragilisés et polymédiqués, peuvent donc être particulièrement exposés.

 

1 565 effets indésirables
rapportés

Depuis la création officielle du dispositif de nutrivigilance (2010), 1 565 cas d’effets indésirables ont été signalés à l’Anses, que ce soit par des professionnels de santé (45 %) – issus de Centres 
régionaux de pharmacovigilance (CRPV, 20 %), de Centres antipoison et de toxicovigilance (CAPTV, 
16 %), d’hôpitaux (4 %) ou du secteur libéral 
(2 %) – ou par des industriels (52 %, majoritairement suite à une sollicitation de l’Anses après qu’un premier cas lui a été déclaré).

La plus grande partie de ces cas est liée à la consommation de compléments alimentaires (76 %) et d’aliments enrichis ou de denrées destinées à une alimentation particulière (24 %). « Au total, 33 % de ces signalements ont été jugés suffisamment renseignés et exploitables pour faire l’objet d’une analyse approfondie », détaille le Pr Irène Margaritis, chef de l’unité d’évaluation des risques liés à la nutrition au sein de l’Anses. En conséquence de quoi, l’Agence a rendu 9 avis assortis de recommandations (remis aux ministères concernés afin que ces derniers prennent les mesures qui s’imposent), notamment sur les risques liés à la présence de levure de riz rouge ou de p-synéphrine dans les compléments alimentaires. Ainsi, la p-synéphrine, présente dans l’écorce d’orange amère (citrus aurantium ssp.aurantium) et d’autres espèces de citrus, ne doit pas être consommée avec de la caféine ni dans des proportions supérieures à 20 mg par jour. Elle est également déconseillée en cas de traitement anti-hypertenseur1.

 

Troubles digestifs et allergies

Les conséquences liées à la consommation grandissante de ces produits2 peuvent être sévères. La plupart des effets indésirables recensés sont d’ordre hépatique, digestif et allergique. D’autres sont d’ordre neurologique, cardiovasculaire, dermatologique voire endocrinologique. Certaines substances peuvent également être sources d’asthénie, de fièvre, de céphalée, de malaise et de troubles métaboliques de types acido-cétose et alcalose métabolique. Quelques effets bucco-dentaires ont également été signalés, bien que très rares à l’heure actuelle : « Il s’agit d’atteintes telles que des colorations dentaires ou des aphtes, essentiellement dues à des compléments alimentaires », précise Aymeric Dopter, l’un des responsables du dispositif de nutrivigilance à l’Anses.

L’Agence appelle donc à la sensibilisation des consommateurs mais aussi à la vigilance des professionnels de santé et des  soignants, quel que soit leur lieu d’exercice. Elle invite ces derniers à déclarer tout effet indésirable suspect via le site Internet https://pro.anses.fr/nutrivigilance/.     
« Sans signalements et sans informations exploitables, nous aurons du mal à mener à bien nos expertises », insiste le Pr Irène Margaritis. Pour les populations spécifiques telles que les personnes âgées, 
« des apports supplémentaires en vitamines, minéraux et autres nutriments par les compléments alimentaires peuvent présenter un intérêt mais sur conseil médical », conclut l’Anses, surtout si ces personnes sont, en prime, sous traitement médicamenteux, ce qui est la plupart du temps le cas. 

Nathalie Ratel

  


 

Vers une surveillance européenne ?

Ce système de nutrivigilance, qui se veut complémentaire des systèmes réglementaires d’évaluation des risques existants, semble faire des émules. « En juin dernier, nous avons rencontré les représentants de treize pays de l’Union européenne – dont l’Espagne, l’Allemagne, la Belgique, la Suède et les Pays-Bas – intéressés par l’idée d’installer ce dispositif dans leur pays, détaille le Dr Marc Mortureux, Directeur général de l’Anses. Notre objectif est, entre autres, de créer un réseau d’échanges avec nos homologues européens pour augmenter la quantité d’informations dont nous pouvons disposer pour procéder à des expertises de qualité. Nous avons également de nombreuses relations avec la Food and drug administration (FDA) américaine. »


 

 

 

 

 

 

 

 

 

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