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Comment mieux recruter ? Non classé

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EmbaucheParce que les Ehpad pâtissent d’un turn-over et d’un absentéisme importants et que, paradoxalement, les demandes de professionnalisation et de personnels ne cessent d’augmenter, le recrutement constitue une étape-clé pour 
les établissements. 
Mais comment le valoriser ? Éléments de réponse.

 

 

Tous les experts en recrutement s’accordent à le dire : le principal problème des Ehpad en matière de recrutement est lié à l’attractivité d’un secteur encore méconnu et parfois mal vu du grand public. Nombreux sont en effet les soignants qui jugent le secteur des personnes âgées moins « valorisant » notamment parce que les actes y sont moins techniques, souligne Richard Capmartin, Directeur associé du cabinet RC Recrutement, spécialisé dans le secteur médico-social. Autrement dit, « le travail à l’hôpital est perçu comme plus qualifiant du fait de la technicité des actes mais aussi comme offrant des perspectives de carrière plus diversifiées avec des possibilités de mobilité en interne. Le déficit d’attractivité vient également d’un problème d’image et de tabous, notamment ceux de la mort et du corps vieillissant ». A cela s’ajoute, souligne Jérôme Houdin, consultant et formateur en ressources humaines, une véritable quête d’épanouissement professionnel chez les personnels soignants (infirmiers, aides-soignants, aides médico-psychologiques) issus de la génération Y (nés entre le début des années quatre-vingt et le début des années deux mille). « Ils font face à un marché de l’emploi vaste et n’hésitent pas, s’ils ne trouvent pas de sens dans leur travail et s’ils ne se sentent pas bien, à démissionner d’un poste. »

Or, le vieillissement de la société va de pair avec la mutation des Ehpad, lesquels accueillent de plus en plus de personnes très âgées dépendantes, souvent polypathologiques. Et cela ne fait qu’accroître la demande de médicalisation des établissements et donc le besoin de personnels soignants. Déjà, en 2009, un rapport de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), intitulé 
« Emploi lié à la dépendance », prévoyait qu’en 2020, six emplois sur dix seraient consacrés au soin… Et, au vu des finances exsangues de la France, il est à craindre que le salut comptable ne viendra pas du Gouvernement.

 

Prendre le temps de chercher

Mais alors comment recruter face à toutes ces difficultés ? En premier lieu, il faut prendre son temps, malgré l’urgence de la situation. « Très souvent, et c’est compréhensible, le manque de personnel suscite un effet de panique, relève Jérôme Houdin. Il faut absolument trouver quelqu’un qui va assurer le poste dès le lendemain si bien que l’on ne prend pas le temps de bien recruter. On prend le premier candidat qui arrive et cela génère souvent un turn-over, soit parce que la personne ne se sent pas intégrée, soit parce que ses compétences ne sont pas au niveau des exigences requises par le poste. On oublie que recruter, cela prend du temps, qu’il ne s’agit pas simplement de remplir une case vide dans un planning ».

Pour trouver les bonnes recrues, Anne-Sophie De Larauze recommande donc de multiplier les canaux de diffusion. « Il faut mettre en ligne des annonces sur les sites spécialisés mais aussi généralistes et locaux, passer par Pôle Emploi, les agences de cadres etc. Il ne faut pas non plus négliger le réseau professionnel, notamment via les écoles. Cela fait rayonner l’entreprise et permet d’avoir une visibilité sur les professionnels à recruter. » Autre point d’approche, les anciens stagiaires. Ils constituent un vivier important de professionnels en devenir pour les directeurs et présentent l’avantage de connaître l’établissement, ses atouts, ses difficultés. Cela constitue aussi, selon Jérôme Houdin, car, un levier d’amélioration de l’attractivité « par le biais des stages, l’Ehpad peut s’interroger sur la communication et l’image qu’il transmet à l’extérieur ».

Pour Laurent Obringer, Directeur de deux Ephad associatifs à Strasbourg, les logiques de « mise en réseau » avec les Conseils régionaux et les partenaires locaux sont d’une grande utilité pour recruter. Encore faut-il préparer l’entretien et séduire les futurs salariés…

 


Bien penser l’entretien

L’entretien passe d’abord, évidemment, par une étude précise du curriculum vitae : on ne s’arrête pas uniquement à une compétence validée par un diplôme. « Repérez les points forts mais aussi les zones d’ombre à vérifier en entretien. Vous pouvez aussi ajouter des tests psychométriques, conseille Richard Capmartin. En Ehpad, on travaille avec l’humain et les émotions, tout ceci doit donc permettre de mieux cerner la personnalité et surtout d’éviter d’engager par défaut ». Là encore, inutile de précipiter les choses : il faut prendre le temps de cerner la personne dans son entièreté, ne pas négliger la case « divers » qui peut parfois révéler beaucoup de choses sur la personnalité d’un candidat. Surtout, l’entretien doit être « le plus concret possible » pour comprendre qui est le candidat au-delà des diplômes et des compétences, précise Anne-Sophie De Larauze. Pour cela, il convient de « creuser toutes les questions et les doutes, de demander au candidat d’illustrer ses propos par des exemples et des situations rencontrées, par exemple la maltraitance. » L’approche pragmatique permet en effet de mieux cerner le caractère et les compétences du professionnel.

Vient ensuite, et c’est une étape cruciale, la présentation de l’établissement. Trop souvent, les employeurs négligent le fait que, dans un recrutement, la séduction est réciproque, rappelle Jérôme Houdin. « Le recrutement constitue certainement la phase la plus difficile en ressources humaines car c’est une phase d’apprivoisement. Nous présentons notre philosophie, notre manière de prendre soin des résidents, de promouvoir leur bien-être etc. A nous de trouver les valeurs et les points sur lesquels on peut cheminer ensemble », résume ainsi Laurent Obringer. Le directeur d’Ehpad se doit donc d’être transparent et honnête sur son établissement, le poste et le projet qu’il propose, son potentiel d’attractivité ou non, l’organisation et les difficultés éventuelles auxquelles est confronté l’établissement, le ratio de personnel, le volume horaire etc. « Le discours vrai parle plus aux candidats que les paroles flamboyantes. Beaucoup de salariés sont en quête de sens dans leur travail. Ils veulent être réellement utiles et œuvrer, pour un projet d’établissement, en collaborant avec une équipe », explique Jérôme Houdin.

Par ailleurs, il ne faut pas hésiter à mettre les candidats en situation afin de vérifier qu’ils sont suffisamment à l’aise dans l’environnement des personnes âgées plus ou moins dépendantes et parfois atteintes de troubles cognitifs sévères. « Cela permet parfois de révéler les compétences de certains professionnels qui sont excellents dans la pratique et dans leur contact avec les résidents mais qui ne savent pas nécessairement se vendre », indique Jérôme Houdin.

Valoriser la période d’essai et l’intégration

Le recrutement ne s’arrête pas à l’entretien. Il se poursuit à travers l’intégration du nouveau salarié, notamment pendant la période d’essai. Une étape elle aussi essentielle tant pour l’employé que l’employeur. L’accompagnement doit donc être prégnant durant les premières semaines afin que le directeur puisse évaluer les compétences du salarié et que celui-ci puisse, de son côté, apprécier son appétence pour le poste. « C’est un véritable apprivoisement, un partage et un partenariat que l’on construit avec le salarié, confirme Laurent Obringer. Il faut accompagner le nouveau salarié, quitte à ce que, parfois, l’intégration se solde par un échec et que l’on mette fin au contrat au terme de la période d’essai malgré ce que cette décision peut avoir de contraignante par rapport aux difficultés à recruter… Car la vraie question est la suivante : prend-on quelqu’un à tout prix ou continue-t-on à maintenir un certain 
niveau d’exigence dans notre recrutement ? »    

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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