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L’hygiène bucco-dentaire en Ehpad Au quotidien

Informer et former à
l’hygiène bucco-dentaire en Ehpad

« Aimez vos dents », c’est le mot d’ordre de la première Journée nationale de la santé bucco-dentaire en Ehpad qui aura lieu le 15 juin prochain. Un événement organisé conjointement par l’UFSBD et le Synerpa. L’occasion de faire le point sur la santé bucco-dentaire des personnes âgées dépendantes, les principaux écueils et surtout les moyens pour les établissements de les surmonter. Comme souvent, la solution passe notamment par la formation des personnels.

Les chiffres relatifs à la santé bucco-dentaire des résidents d’Ehpad sont alarmants. 75 % d’entre eux ont en effet un état bucco-dentaire dégradé (lire encadré ci-dessous). Une situation qui a incité l’UFSBD (Union française pour la santé bucco-dentaire) et le Synerpa (Syndicat national des établissements et résidences privés pour personnes âgées) à sensibiliser les personnels des Ehpad et leurs résidents à cette question. Une action qui prendra la forme d’une journée-événement sur ce thème, le 15 juin prochain.

Les établissements y participant accueilleront à cette occasion un chirurgien-dentiste de l’UFSBD qui proposera des ateliers ludo-éducatifs associant les résidents de l’Ehpad mais aussi des élèves d’écoles primaires voisines invités pour l’occasion afin de « montrer que tout le monde est concerné », explique le Dr Benoît Perrier, chirurgien-dentiste à Nantes et président de l’UFSBD pour le département de Loire-Atlantique. Ainsi, avec des accessoires (une maxi-mâchoire, des débris de nourriture en pâte à modeler et des maxi-brosses), l’idée est de montrer aux enfants, avec l’aide des résidents, comment se brosser les dents. L’accent sera aussi mis sur les recommandations nutritionnelles. « Aucun aliment n’est interdit en matière de santé bucco-dentaire, tient à rappeler le Dr Perrier. Mais il faut faire attention au rythme de consommation, en évitant les grignotages entre les repas, à l’origine de caries, et savoir qu’en fonction de leur consistance, certains aliments restent davantage entre les dents. » Pour pousser plus loin l’échange, ces ateliers seront suivis de séances de questions-réponses entre le chirurgien-dentiste et le personnel de l’Ehpad.

« Les personnes atteintes ne parviennent plus
à exprimer leurs besoins »

Cette journée marquera en fait le coup d’envoi d’une convention de formation continue signée par l’UFSBD et le Synerpa. Les formations proposées, d’une durée de trois à sept heures, seront là encore assurées par un chirurgien-dentiste. Elles comprendront un volet théorique et une partie pratique en chambre auprès des résidents pour guider les gestes de soin. Il convient en effet de rappeler que les équipes soignantes en Ehpad (aides-soignants et infirmiers) abordent la question bucco-dentaire de manière très superficielle lors de leur formation initiale. En l’occurrence par le biais d’une session de deux à trois heures pour savoir ce qu’est une dent ou une gencive mais sans une approche spécifique aux personnes âgées.

Pourtant, la santé bucco-dentaire a un impact plus

général sur la santé et la qualité de vie de ces dernières comme le confirme Benoît Perrier : « Un sourire édenté, une élocution difficile peuvent limiter la communication et entraîner un repli sur soi qui peut être un premier pas dans la spirale de la dépression. Les pathologies neurodégénératives, la maladie d’Alzheimer et autres démences ou troubles de la mémoire viennent encore compliquer la donne. Les personnes atteintes ne parviennent plus à exprimer leurs besoins. Les personnes âgées pensent aussi souvent à tort que la dégradation de leur dentition est une fatalité. »

Les troubles bucco-dentaires peuvent aussi entraîner une dénutrition. « La bouche est évidemment le premier point de passage des aliments, insiste le Dr Perrier. Des abcès, des dents manquantes ou des gencives douloureuses rendent l’alimentation difficile. Les Ehpad sont très attentifs au suivi du poids de leurs résidents mais ne savent pas toujours comment agir. Il faut donc former les personnels. »

Un référent en santé orale formé dans chaque établissement

Ce que fait déjà Régies95. Ce réseau gérontologique interétablissement regroupe la quasi-totalité des Ehpad du Val-d’Oise (70 sur 74). « Nous ne sommes pas un réseau de santé mais une structure associative qui vise à réfléchir ensemble à nos pratiques et à mettre en place des actions et des outils à la disposition de tous les membres du réseau, explique Christian Boissel, son président, également directeur d’Ehpad. Nous procédons sous forme de groupes de travail qui rassemblent toutes les catégories professionnelles de nos établissements, de l’administration au médical en passant par l’hôtellerie. C’est ainsi qu’un groupe de travail s’est penché sur les exigences du Plan national nutrition santé, lancé en 2001 pour améliorer les repas de nos résidents. Nous avons alors créé un Comité de liaison pour l’alimentation et la nutrition (Clan), au niveau départemental et partagé entre tous nos établissements. » De fil en aiguille, au sein du Comité, le premier constat a été fait que pour bien manger, il faut une bouche en bon état. Un nouveau groupe de travail a alors été formé et porte sur l’amélioration de la santé bucco-dentaire des résidents. De son côté, Régies95 s’est rapproché du Dr Baranes de la faculté dentaire de Paris V, de l’Inserm et de la CPAM du Val-d’Oise pour élaborer un plan de formation.

Et, à partir de 2006, un coordinateur-relais en santé bucco-dentaire (devenu depuis référent en santé orale, selon la dénomination des ARS – N.D.LR.) a été formé dans chaque établissement parmi les aides-soignants et les infirmiers. Il est chargé d’intervenir à trois niveaux : directement auprès des résidents mais aussi auprès de ses collègues pour leur transmettre les bonnes pratiques et des chirurgiens-dentistes en cas de problème. Mais Régies95 est déjà passé à la vitesse supérieure grâce à l’aide financière du groupe de retraite Réunica. Désormais, en plus du référent, le médecin coordonnateur de chaque établissement et des chirurgiens-dentistes libéraux volontaires est également formé. Ainsi, « en 2011, 24 équipes ont été formées. 24 de plus le seront cette année puis en 2013 pour que l’ensemble de nos établissements soient pourvus en binômes référent+médecin coordonnateur formés », précise Christian Boissel.

Dans le même esprit, l’UFSBD a également publié une charte de recommandations pour les Ehpad. Celle-ci préconise notamment la mise en place d’un protocole général pour l’établissement et de protocoles d’hygiène personnalisés par résident ainsi que l’identification de référents bucco-dentaires spécifiquement formés au sein de l’établissement afin de garantir la qualité des procédures et d’assurer l’évaluation des pratiques.

Valérie Devillaine

 

Des chiffres qui font mal

75 % des résidents d’Ehpad ont un état bucco-dentaire dégradé.

44 % ont au moins une dent cariée.

30 à 50 % auraient besoin d’une prothèse.

42 % n’ont pas consulté un chirurgien-dentiste depuis cinq ans.

60 à 70 % sont incapables de réaliser seuls les gestes d’hygiène bucco-dentaire comme le brossage des dents.

Source UFSBD.

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