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Comment prévenir les conflits avec les familles ? Non classé

Les résidents et leurs proches sont de plus en plus sourcilleux : ils entrent dans une logique de payeurs, de clients et de consommateurs. D’où le risque fréquent d’incompréhensions et de conflits avec l’établissement. Tour d’horizon non exhaustif des solutions pour s’adapter.

Au bout de la logique de plus en plus consumériste des résidents et de leurs proches se trouve le risque de multiplication des conflits jusqu’à éventuellement leur judiciarisation. Les courriers des familles aux Agences régionales de santé (ARS) et aux Conseils généraux ne sont plus si rares de même que les plaintes auprès des tribunaux. Ces revendications ne sont pas nécessairement illégitimes. À condition que les attentes des familles correspondent à celles des personnes âgées et que les familles ne soient pas plus tournées vers la sécurité et la gestion du risque que vers le projet de vie de leur proche. Avec le risque, pour les établissements, de se focaliser sur la prévention des risques à tout prix, en interdisant par exemple de fumer dans toutes les pièces de l’Ehpad, y compris dans les chambres, afin d’éviter les accidents.

Culpabilité

La solution ? Déculpabiliser les familles. « Beaucoup considèrent l’entrée en institution comme l’échec de leur prise en charge personnelle, souligne Stephan Meyer, vice-Président de la Fédération française des associations de médecins coordonnateurs en Ehpad (FFAMCO). Elles sont en souffrance et donc bien souvent en position de revendication et d’hyperprotection vis-à-vis de leur proche âgé. » C’est pourquoi l’idée est de leur faire comprendre que l’entrée en institution n’est pas un échec de leur part mais une opportunité de confier leur proche dépendant à des personnels formés pour le prendre en charge correctement.

Médecins coordonnateurs et directeurs doivent s’unir pour informer, rassurer et montrer que l’Ehpad, loin d’être un lieu clos, est un lieu de vie ouvert. Ils doivent également démontrer que l’entrée en institut n’est pas définitive : les personnes âgées retrouvant un peu d’autonomie peuvent tout à fait retourner à leur domicile avec les aides appropriées.

Transparence

Certains établissements se sont interrogés sur la façon de rassurer les résidents et leur famille lors de l’entrée en institution. Au sein du groupe Colisée Patrimoine, l’accent a été mis sur la formation du personnel chargé d’accueillir et de faire visiter les lieux aux seniors et aux proches. L’objectif : leur permettre de faire face à l’éventuelle détresse, angoisse ou culpabilité des personnes et de les laisser correctement s’exprimer. Le groupe a également édité un document intitulé Les 100 questions listant les questions indispensables que doivent se poser les seniors et leurs proches lorsqu’ils choisissent un établissement, précise Pascale Espaillard, directrice des Exploitations au sein du groupe. L’occasion de faire d’emblée le point sur les services et les accompagnements que les établissements du groupe proposent ou non, ou encore sur ce à quoi correspond la somme versée chaque mois par le résident. « Il est important que ces questions soit posées avant même l’arrivée du résident dans un souci de transparence, explique Pascale Espaillard. C’est indispensable pour pouvoir bâtir une relation de confiance et éviter des difficultés qui pourraient mettre en péril l’accompagnement de la personne âgée. »

Pédagogie

Par la suite, il est important de maintenir un dialogue permanent avec les familles au sein des instances prévues à cet effet, comme le Conseil de la vie sociale (CVS), mais aussi en dehors, par exemple lors de prises de rendez-vous ponctuelles. Cela permet de bien expliquer comment fonctionne un Ehpad et de briser les idées reçues qui persistent.

« Les familles s’imaginent souvent qu’une fois en Ehpad, la personne âgée ne chutera plus, détaille Didier Sapy, directeur de la Fédération nationale avenir et qualité de vie des personnes âgées (Fnaqpa). Elles pensent qu’elle est suivie vingt-quatre heures sur vingt-quatre par un membre du personnel pour vérifier que tout va bien. Or, c’est impossible et ce n’est pas parce qu’une personne âgée est en institution qu’il n’y a plus de risque pour elle. Celui-ci existe toujours même s’il est moindre. »

 

« Être disponibles pour les familles »

Fanny Prouvost, Directrice de la résidence Les Marronniers de Marcq-en-Barœul (Nord).

« Nous avons vraiment mis l’accent sur la relation avec les familles. Cette année, nous aurons organisé quatre réunions du Conseil de la vie sociale (CVS) dans l’établissement. Actuellement, nous finalisons un livret pour les aidants naturels afin de les aider à se repérer dans l’établissement. Par ailleurs, nous transmettons également aux familles des informations par mail comme la programmation des animations. Car plus on intègre les familles dans la prise en charge, plus la collaboration est efficace. Les familles se sentent souvent démunies. Nous les aidons donc à comprendre certaines maladies comme la maladie d’Alzheimer et notre psychologue leur transmet parfois des documents ou des articles sur le sujet. Nous essayons d’être disponibles pour les familles. Mon agenda, comme celui de mon attachée de direction, sont ouverts au personnel d’accueil et aux référents de chaque service. Ceux-ci peuvent ainsi, sans attendre mon accord, programmer un rendez-vous avec chaque famille qui le souhaite. »

 

« Rassurer par des équipements innovants »

Jean-Louis Poignonec, Médecin gérontologique et médecin coordonateur du groupe Age Partenaires.

« Nous installons dans nos établissements un logiciel assurant la traçabilité des soins grâce à un système de lecture de codes-barres. Chaque pilulier de résident et chaque acte de prise en charge dispose d’un code-barres. Chaque membre du personnel possède un appareil permettant de scanner ou de composer manuellement ces codes. Ainsi, les infirmières scannent-elles le code-barres placé sur le pilulier pour valider la prise du médicament. Quant aux aide-soignantes, elles entrent dans leur appareil les codes correspondant aux actes de stimulation ou de toilette qu’elles effectuent. Cette procédure permet de suivre les actes réalisés auprès des résidents puis d’informer les familles. Pour les rassurer, nous prévoyons d’autres équipements innovants dans nos nouveaux établissements. Nous posons, par exemple, le même revêtement sur le sol de la chambre et de la salle de bain des résidents afin de limiter les chutes dues au changement de couleur ou de texture ou encore à la barre de seuil. Mais nous avons également ajouté une substance antidérapante dans la salle de bain. Elle est obligatoire mais invisible à l’œil nu. »


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