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La manutention des résidents conçue comme un soin Non classé

Le soin de manutention sans porter : tel est le credo pour éviter que la manutention des résidents demeure à l’origine de nombreux accidents du travail et de maladies professionnelles.

 

La manutention des résidents reste problématique dans le secteur médico-social et explique en grande partie que ce dernier affiche une sinistralité trois fois supérieure à la moyenne de l’ensemble des autres secteurs d’activité en France. Face à ce constat, de nombreux établissements ont mis en place des formations aux gestes et postures ainsi que des équipements d’aide à la manutention. Malheureusement, ces initiatives ne génèrent pas les effets escomptés, la fréquence des accidents du travail et des maladies professionnelles continuant en effet de croître.

La crainte d’un rejet des équipements par le résident, l’efficacité pas toujours optimale des matériels de manutention ou encore des contenus de formations destinés aux soignants pas toujours adaptés à la réalité de leurs tâches peuvent expliquer ces échecs. Or, en abordant la manutention du patient comme un soin, il est possible de l’adapter à l’état présent du résident et d’intégrer ce dernier dans son soulèvement et son déplacement s’il en a la capacité.

 

La manutention d’un résident ou la construction d’un soin singulier

Par exemple, dans le cas du rehaussement, dans son lit, d’un résident ayant des capacités physiques suffisantes au moment de l’intervention, le soignant devra avoir identifié ce potentiel et ainsi diriger le rehaussement pour solliciter les capacités du résident en le guidant pas à pas afin qu’il se déplace naturellement. Ainsi, en abordant la manutention comme un soin et non comme la mise en œuvre automatique d’une technique gestuelle de portage, le soignant aura conçu un rehaussement qualitatif à la fois bénéfique pour le résident (en favorisant au maximum son autonomie et sa sécurité) et pour lui-même (en ne portant pas le résident).

Au cours de la journée, les facultés du résident peuvent régresser en raison de la fatigue, au point qu’elles ne soient plus suffisantes pour qu’il puisse se rehausser lui-même. Dans la logique du soin de manutention sans porter, avant d’agir, le soignant devra, là encore, avoir préalablement diagnostiqué cette perte momentanée de capacités. Et ce, afin d’envisager un rehaussement différemment qui intègre, cette fois, un outil d’aide à la manutention dans le soin comme le drap de glisse sur lequel il fera glisser le résident vers la tête de lit sans le porter.

Bien que l’objectif soit identique (rehausser le patient dans son lit), le soignant aura pourtant réalisé ce déplacement sans porter et de deux façons différentes selon la variabilité des capacités physiques du résident. C’est pourquoi la manutention d’un résident est la construction d’un soin singulier élaboré dans un souci d’éviter les risques iatrogènes pour le résident et les risques professionnels liés aux manutentions manuelles (en les supprimant) pour le soignant.

 

Former des personnes ressources

Cette approche du soin de manutention sans porter nécessite une réflexion en amont sur les équipements d’aide mis à la disposition des équipes ainsi que sur les formations relatives à ces dispositifs. Sans compter une réflexion sur les aménagements des chambres et des espaces de travail afin qu’ils soient en cohérence avec le soin de manutention sans porter. Une telle démarche bouscule les habitudes et requiert une action animée et pilotée au sein de l’établissement par une personne ressource chargée de mettre en place des mesures de prévention mais aussi les actions de formation nécessaires. Il pourra s’agir d’un soignant confronté à la pratique du soin de manutention et formé pour être cette personne ressource. Référent pour ce qui est de la méthodologie, il identifie puis analyse les situations de travail à risque en vue de définir ensuite avec les équipes les solutions techniques et organisationnelles à proposer à la direction. Enfin, il forme ses collègues au soin de manutention sans porter et participe à l’élaboration du cahier des charges concernant les matériels d’aide à la manutention et la conception des locaux de travail.

Dans cette optique, la Cramif et le Groupe hospitalier Paris Saint-Joseph ont élaboré, en partenariat, une formation intitulée « Devenir référent TMS en secteur santé ». Elle a pour but de former les personnes ressources, d’autonomiser les établissements de santé dans leur démarche de prévention des risques liés aux manutentions des patients ou des résidents et d’améliorer les conditions de travail des soignants en développant le soin de manutention sans porter. Par ailleurs, l’Agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France s’est jointe au dispositif en intégrant cette formation dans son Contrat local d’amélioration des conditions de travail (CLACT), lequel permet aux établissements ciblés par l’ARS de bénéficier d’une dotation en matériel afin de soutenir cette démarche.  

 

 David Baudet et Christophe Bon (contrôleurs de sécurité), Philippe Corre (ingénieur conseil)


Formation « Devenir référent prévention TMS en secteur santé » :   modus operandi

La direction d’un établissement de santé qui souhaite envoyer un soignant suivre la formation « Devenir référent prévention TMS en secteur santé » doit préalablement participer à une information sur les enjeux et le dispositif de cette formation dispensée depuis 2005 dans le cadre du partenariat qui unit la Cramif et le Groupe hospitalier Paris Saint-Joseph (GHPSJ).

Par la suite, l’inscription à la formation est validée par la Cramif par le biais d’un dossier de candidature et suite à un entretien avec la direction et son candidat afin d’évaluer le projet de l’établissement. L’engagement de la direction tout comme le profil du candidat sont effectivement cruciaux pour la réussite de la démarche de prévention des TMS qui sera développée par le futur référent prévention TMS.

La formation, d’une durée de treize jours, se déroule principalement au Groupe hospitalier Paris Saint-Joseph dans le centre ressource dédié qui intègre une chambre d’hôpital équipée de tout le matériel d’aide à la manutention. Elle s’adresse à des professionnels tels que les auxiliaires de vie, les aides médico-psychologiques, les aides-soignants(es), les manipulateurs en radiologie, les kinésithérapeutes mais surtout les infirmiers(ères), les ergothérapeutes, les psychomotriciens ou les cadres de santé. Une partie de la formation concerne la méthodologie et les outils de la démarche de prévention des TMS ainsi que la mobilisation des compétences dans un projet participatif. L’autre partie est plus spécifiquement axée sur l’élaboration du soin de manutention sans porter.

Les après-midi d’information ainsi que la formation « Devenir référent prévention TMS en secteur santé » sont ouvertes à tous les établissements hospitaliers et médico-sociaux d’Île-de-France ayant conclu ou non un Contrat local d’amélioration des conditions de travail (CLACT) avec l’ARS d’Île-de-France. Les inscriptions sont accessibles sur le site de la Cramif (http://www.cramif.fr/risques-professionnels/formations-stages-F-animer-prevention-tms-secteur-sante.php).


 

 

 

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