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Laïcité : quelles règles en Ehpad ? Non classé

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photopancarteLe principe de la laïcité est inscrit dans l’article 1 de la Constitution. Il doit être articulé avec la liberté de religion et de croyance qui est une liberté fondamentale proclamée et protégée par plusieurs textes : la Constitution française mais aussi la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des églises et de l’État. Cela vaut notamment en Ehpad.

 « Les résidents ont droit au respect de leurs croyances et à l’exercice de leur culte, sous réserve du respect de la liberté d’autrui et des contraintes découlant des nécessités de  l’organisation et du bon  fonctionne- ment de l’établissement », synthétise Solenne Bru- gère, avocate du cabinet Carakters spécialisée en droit sanitaire et médico-social. L’organisation et les conditions du bon fonctionnement général de la structure sont fixées par le règlement intérieur re- latif au fonctionnement de l’établissement, lequel détaille également les droits et libertés de chacun. Il est complété de la Charte des droits et libertés de la personne accueillie remise à chaque résident lors de son admission, dont l’article 11 instaure un droit à la pratique religieuse : « Les conditions de la pratique religieuse, y compris la visite de représentants des différentes confessions, doivent être facilitées sans que celles-ci puissent faire obstacle aux missions des établissements ou services. Les personnels et les bénéficiaires s’obligent à un respect mutuel des croyances, convictions et opinions. Ce droit à la pra- tique religieuse s’exerce dans le respect de la liberté d’autrui et sous réserve que son exercice ne trouble pas le fonctionnement normal des établissements et services. »

 

Ehpad publics, Ehpad privés

Ces questions sont, en principe, discutées à l’occa- sion de l’entretien préalable à l’admission des ré- sidents afin de déterminer ce qui est envisageable ou non au sein de l’Ehpad. Elles sont aussi, bien entendu, abordées différemment selon les Ehpad, notamment selon le statut de ces derniers. Les Ehpad publics sont en effet soumis au principe de laïcité du service public qui impacte aussi bien les agents en tant que fonctionnaires que les résidents en tant que citoyen (obligation pour le personnel de répondre aux résidents et à leurs proches sur un plan professionnel et non pas au regard de leurs convictions personnelles, interdiction pour tous de faire du prosélytisme etc.). L’organisation mise en place au sein des Ehpad privés est quant à elle plus libre : ces derniers peuvent opter pour un principe de neutralité religieuse équivalent à celui du prin-cipe de laïcité… ou pas.

C’est en particulier le cas des Ehpad confessionnels. Ainsi, par exemple, la Maison de retraite et de gériatrie (Paris 12e), gérée par la Fondation de Rothschild est un Ehpad privé à but non lucratif « ouvert à toute personne, sans discrimination quelle que soit sa race ou sa religion mais (qui) respecte la tradition juive avec la célébration du Shabbat et des fêtes religieuses », précise l’établissement. De plus, « une synagogue, ouverte sur l’extérieur, permet la célébration des offices au quotidien » ; « la restauration respecte les règles de la cacherout et il est interdit d’apporter et de consommer des denrées non cachères dans les espaces communs ». Autre exemple : les maisons de retraite catholiques peuvent être tenues par des religieuses en tenue ecclésiastique.

 

Espaces collectifs, espaces privés

En dehors des cas des Ehpadconfessionnels, les établissements – leur directeur en tête – déterminent les pratiques  religieuses qui sont contraignantes ou non pour leur bon fonctionnement et tranchent les cas litigieux. Pour les aider à placer le curseur concernant leurs résidents, l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Anesm) re- commande aux Ehpad publics et privés d’« accepter tous les signes religieux dans l’espace privatif », de « respecter les rites et pratiques effectués dans l’es- pace privatif » ainsi que les « régimes alimentaires en fonction des éléments discutés et acceptés lors de l’entrée en établissement et de l’élaboration du projet personnalisé », de « faciliter l’accès aux lieux et aux ministres du culte », d’« identifier au sein de l’établissement une personne ressource (notamment un ministre des cultes, N.D.L.R.) pour chacune des principales religions afin de pouvoir transmettre leurs coordonnées si besoin » et de « rester très vigilant à tout risque de prosélytisme et de dérive sectaire ».

Pour mémoire, « le deuxième volet des recomman- dations sur la qualité de vie en Ehpad de l’Anesm af- firme que le respect des croyances et le libre exercice du culte sont des éléments essentiels à la qualité de la prise en charge » et prévoit « la nécessité de faciliter les conditions de pratique de la vie spirituelle » (un déplacement par semaine au sein d’un lieu de culte, un plateau repas le soir ou la nuit pour les personnes faisant le ramadan ou encore un report des moments de soin ou de toilette pendant les temps de prière, par exemple), souligne Solenne Brugère. En cas de non-respect, les établissements sont susceptibles de se voir enjoindre de remédier à ces manquements par leurs autorités de tutelle. Ils peuvent en outre potentiellement être  accusés de maltraitance ou de discrimination avec des sanctions pénales à la clé (amende et emprisonnement).

 


 Et La Charte des droits et libertés de la personne âgée en situation de handicap ou de dépendance? 

Outre la Charte de la personne accueillie, visée par l’article L311-4 du Code de l’action sociale et des familles, “les établissements peuvent appliquer la Charte des droits et libertés de la personne âgée en situation de handicap ou de dépendance, élaborée par la Fondation nationale de gérontologie (FNG)”, précise Solenne Brugère, avocate spécialisée en droit sanitaire et médico-social.

L’article 7 de cette charte, prévoit que quel que soit son lieu de vie (individuel ou collectif), la personne “a droit à des temps de recueillement spirituel” et que “chaque établissement doit disposer d’un espace d’accès aisé pouvant servir de lieu de recueillement et de culte et permettre la visite des représentants des diverses religions et mouvements philosophiques non confessionnels en dehors de tout prosélytisme”. La Charte précise enfin que “les rites et usages religieux ou laïcs s’accomplissent dans le respect mutuel”.


 

 

 

 

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