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Chutes : comment les gérer Non classé

Chutte

ChutteQue faire lorsque l’accident tant redouté se produit ? Appliquer scrupuleusement un modus operandi formalisé et précis sans omettre de remplir les documents correspondants. Explications.

« Cela paraît évident mais en cas de chute, il est impératif de respecter une procédure écrite que tous les soignants doivent connaître », rappelle, en préambule, le Dr Priscilla Clot-Faybesse Malfuson, médecin coordonnateur au sein du groupe Korian. De même, tous les intervenants potentiels (service des urgences, pompiers, médecin d’astreinte) doivent-ils être identifiés et leurs coordonnées immédiatement accessibles.


1 – Les protocoles

 

a) Le bilan normalisé

Dans le cadre de la prise en charge d’une personne qui vient de chuter, on doit procéder à un bilan normalisé. Ce protocole consiste à effectuer plusieurs actes par l’infirmière :

– Mesurer les constantes (fréquence cardiaque, pression artérielle etc.).

– Relever le patient en cas d’absence de déficit neurologique, de traumatisme crânien avec perte de connaissance et de trauma cervical.

– Lui faire faire quelques pas pour rechercher une éventuelle impotence fonctionnelle ou des douleurs. Si celles-ci sont avérées, le résident passera une radio afin de réaliser un bilan lésionnel.

– En cas de temps passé au sol supérieur à deux heures, ils convient de prévoir un bilan biologique.

– Faire faire un électrocardiogramme pour vérifier que le résident n’est pas sujet à de l’arythmie cardiaque, en particulier à une fibrillation auriculaire paroxystique.

– Vérifier le contenu des prescriptions auxquelles est soumis le résident (rechercher d’AVK, d’antidépresseurs etc. + introduction récente de nouveaux médicaments) pour identifier d’éventuels effets iatrogènes.

Selon la gravité du premier diagnostic, l’infirmière prend contact avec le médecin coordonnateur ou le médecin traitant, voire, au pire, avec les pompiers pour transférer le résident à l’hôpital. Les aides-soignantes de nuit, qui ont vocation à remplacer l’infirmière en cas d’absence de cette dernière, doivent être spécifiquement formées à cette procédure et donc être en mesure d’évaluer l’état clinique du résident et de procéder aux soins d’urgence. Et ce, même si elles sont régulièrement sensibilisées à la question. C’est en général à l’infirmière coordinatrice de s’assurer que les aides-soignantes concernées possèdent les compétences requises et, à défaut, de faire en sorte qu’elles suivent les formations, en interne ou en externe, sur la conduite à tenir en cas de chute.

 

b) Rechercher les signes de gravité et lesfacteurs de risque

Outre ces premiers gestes, il importe de pousser plus loin les investigations et, conformément à la directive de la Haute autorité de santé (HAS) publiée en 2009 et intitulée « Évaluation et prise en charge des personnes âgées faisant des chutes répétées », de « rechercher les signes de gravité ». En l’occurrence, ceux ayant trait :

– Aux conséquences de la chute (traumatismes physiques modérés à sévères ; impossibilité de se relever du sol et ses conséquences ; syndrome post-chute).

– Aux pathologies responsables de la chute (signes de maladie aigüe responsable de la chute).

– Au caractère répétitif de la chute (signe de gravité particulièrement en cas d’augmentation récente de la fréquence des chutes, d’association de plus de trois facteurs de risque de chute, de trouble de l’équilibre ou de la marche).

 

Par ailleurs, il convient de :

– Reconnaître les trois principales situations à risque de chute grave (ostéoporose avérée, prise de médicaments anticoagulants, isolement social et familial).

– Réévaluer la personne dans un délai d’une semaine afin de rechercher les signes de gravité apparus à distance (peur de chuter, restriction des activités de la vie quotidienne, syndrome post-chute).

Plus largement, la survenance de chutes, a fortiori si elles sont répétées, requiert de procéder à une recherche des facteurs de risque (polymédication, arthrose des membres inférieurs, baisse de l’acuité visuelle, déclin cognitif etc.) identique à celle qui avait lieu lors de l’admission du résident. Et ce, afin de diagnostiquer si certains se sont amplifiés et/ou si d’autres sont apparus. Avec, à la clef, la mise en place d’interventions et d’actions destinées à prévenir la récidive des chutes et leurs complications (cf. Ehpad Mag n°26).


 

 

 

 

2 – La chute appelle la chute

Une fois les séquelles immédiates de la chute diagnostiquées et, dans la majorité des cas, résorbées, une autre menace, souvent au moins aussi grave pèse sur le quotidien des résidents : le syndrome post-chute, c’est-à-dire la crainte de rechuter de nouveau qui génère, chez la personne âgée, de l’appréhension, un repli sur soi et un renoncement à effectuer certains actes de la vie courante, en particulier se déplacer, de peur de retomber. Une spirale infernale dans la mesure où cette apathie fragilise davantage l’organisme et amplifie l’altération de la masse musculaire et donc les déséquilibres.

On distingue deux modalités du syndrome post-chute, toutes deux engendrées par la crainte et l’inhibition du sujet :

– la boucle courte marquée par une désadaptation aigüe, c’est-à-dire une sidération des automatismes générant des troubles de l’équilibre et de la poste et donc des chutes ;

– la boucle dite longue caractérisée par une désadaptation chronique, la restriction des activités entraînant une désadaptation progressive, un oubli des automatismes et donc, là encore, de nouvelles chutes.


 

 

3 – Les protocoles

Outre l’obligation d’informer systématiquement la famille, chaque chute doit être l’objet d’une déclaration sous forme de fiche. Ce document est inclus dans le dossier du résident et destiné à faciliter sa prise en charge et son suivi. Il comporte plusieurs items (dont certains à choix multiples) qui en résument les circonstances et les suites :

– Identité de la personne ayant chuté.

– Chute : date, heure, lieu (chambre, couloir, escalier…) ; action réalisée au moment de la chute (bousculade, habillage-déshabillage, transfert aux toilettes…) ; description de la chute ; temps passé au sol ; identité de la personne qui a prévenu de la chute ; personne choquée ou pas par la chute ; contexte de la chute (à jeun, absence de contention, lunettes non portées…) ;

– Conséquences (douleurs, hématomes, plaies, fractures…).

– Traitement (prise en charge post-chute, stimulation psychomotrice…).

Par ailleurs, tout transfert d’un résident à l’hôpital s’accompagne d’un dossier de liaison d’urgence qui comporte aussi bien des données administratives que les antécédents médicaux du résident ainsi que le premier diagnostic effectué après la chute. En revanche, ce dossier ne contient pas la  déclaration de chute, laquelle est plus exhaustive et donc remplie ultérieurement.    

Alexandre Terrini

 

 


 

Faire au plus vite

Entre la prévention des chutes et leur gestion il y a… leur détection. Laquelle doit, dans l’idéal, avoir lieu en temps réel afin de pouvoir intervenir dans les plus brefs délais et juguler les conséquences parfois graves d’une chute. En la matière, la technologie s’avère précieuse à l’image du biocapteur Vigi’Fall développé par la société Vigilio. Ce type de dispositif se déclenche automatiquement en cas d’incident sans que son détenteur ait besoin de l’activer. Il ne se contente pas d’avertir de la chute et possède offre d’autres fonctions : accéléromètre, mesure de la fréquence cardiaque etc. L’évolution technologique aidant, ce genre de procédé arrive de mieux en mieux à distinguer les véritables chutes des faux mouvements et évite ainsi le déclenchement d’alertes intempestives.


 

 


Des indicateurs révélateurs

Trois chiffres permettent de situer l’établissement en matière de chutes. Il s’agit du :

nombre de suivis individuels des chutes mis en place (ou pas) au sein de l’Ehpad ;

– taux de chutes par résident, c’est-à-dire le rapport entre le nombre de résidents ayant chuté au moins une fois au cours des douze mois précédents et le nombre total de résidents ;

– taux de chutes ayant entraîné une hospitalisation, c’est-à-dire le rapport entre le nombre de chutes ayant entraîné une hospitalisation complète de plus de vingt-quatre heures et le nombre de chutes.


 

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