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En Vendée, 500 résidents d’Ehpad 
à l’avant-garde de la télémédecine Non classé

Télémédecine

TélémédecineLauréat d’un appel à projets national lancé en 2011, Télémédinov (Télémédecine interopérable nord-ouest Vendée) permet aux résidents de bénéficier d’une consultation médicale spécialisée en étant mis en rapport direct avec un médecin via un écran numérique. L’outil a permis de résoudre un problème de désertification médicale.

 

Avec une densité médicale globale inférieure de 16 % à la moyenne nationale, les Pays de la Loire, notamment la Vendée, présentent un déficit d’accès aux soins. C’est de ce besoin de soins de la population du nord-ouest vendéen (comprenant l’Île d’Yeu et l’Île de Noirmoutier) qu’est né le projet Télémédinov (Télémédecine interopérable nord-ouest Vendée) en décembre 2012, dans le cadre d’un concours national lancé en 2011 par les pouvoirs publics.

L’objectif de l’expérimentation était alors de faire bénéficier aux personnes âgées en Ehpad de consultations à distance avec des spécialistes adéquats au lieu de les envoyer aux urgences, trop souvent engorgées et synonymes de perte d’autonomie pour elles. « Notre projet visait à modifier l’organisation et les pratiques médicales en utilisant les nouvelles technologies de communication », explique Michel Rioli, directeur du projet Télémédinov et Président du consortium industriel Rio-e-Santé, porteur de l’expérimentation. Aujourd’hui, l’expérimentation prend en charge 500 résidents issus de six Ehpad. Quatorze autres établissements doivent intégrer le dispositif début 2015.

 

Les infirmiers d’Ehpad, clef de voûte de ce système en réseau

Le système fonctionne selon le modèle prôné par Pierre Simon, Président de l’Association nationale de télémédecine (Antel). Ce modèle s’appuie sur l’infirmier en Ehpad pour assurer le lien entre plusieurs cabinets médicaux et établissements de santé et ainsi mutualiser les moyens. « Quand l’infirmier constate une difficulté, après avoir contacté le médecin traitant selon le protocole de recours à la téléconsultation, il met en place, avec son accord ou en cas d’absence, une téléconsultation avec le médecin gériatre, précise Michel Rioli. Puis, ensemble, ils formalisent ensuite la solution : modification ou arrêt du traitement médicamenteux, programmation d’une téléconsultation avec un spécialiste ou, dans les cas extrêmes, organisation de l’hospitalisation du patient. »

L’objectif de Télémédinov est donc d’anticiper les crises aigües et de travailler en amont afin d’éviter le passage par les urgences dont la littérature scientifique a largement détaillé les conséquences délétères (lire encadré ci-contre). En outre, ajoute Michel Rioli, « ce système permet d’améliorer l’efficience médico-économique » en désengorgeant les urgences hospitalières, en orientant immédiatement les patients vers les services médicaux concernés ou en gardant le résident en Ehpad lorsque le transport peut être évité.

Cette logique ne pourrait fonctionner sans une bonne coordination. Les Ehpad travaillent ainsi en réseau avec le Centre hospitalier Loire Vendée Océan mais aussi avec quarante professionnels de santé libéraux locaux (diététiciens, cardiologues, dermatologues, ophtalmologistes, otorhinolaryngologistes, pneumologues, diabétologues) ainsi qu’avec un cabinet de médecine générale et une pharmacie. Michel Rioli évoque également un possible partenariat avec un chirurgien-dentiste.

 

Des répercutions positives sur les résidents et les soignants

Les premières enquêtes de satisfaction auprès des résidents comme des soignants sont plutôt positives. Télémédinov permet en effet, selon Michel Rioli, d’éviter les déplacements des personnes âgées à hauteur de 70 %. Sylvie Dubin, cadre de santé à l’Ehpad de Commequiers (85), Les Mimosas, l’un des établissements associés au projet Télémédinov, en voit les bénéfices sur le bien-être des résidents. « Avant, par exemple, nous ne pouvions pas faire soigner leurs problèmes de peau car notre équipe n’avait pas les moyens d’emmener les personnes âgées chez le spécialiste. Télémédinov résout maintenant ce problème » témoigne-t-elle.

Ce système a également permis de mettre en place des évaluations gériatriques. Les résidents effectuent un bilan de santé complet avec différents professionnels de santé (kinésithérapeutes, diététiciens, psychologues et médecins gériatres) dans l’hôpital local puis l’équipe hospitalière se connecte ensuite, via visioconférence, avec les soignants de l’Ehpad afin de faire le bilan sur la situation du patient et le type d’accompagnement global à mettre en place. « Ces échanges nous permettent de mieux comprendre les comportements de nos résidents et, par là-même, d’améliorer nos pratiques pour mieux accompagner les personnes âgées en Ehpad », se réjouit Sylvie Dubin.

Pour la cadre de santé, l’ouverture de la télémédecine dans son Ehpad a également eu un impact positif sur les équipes, en particulier sur les soignants. « La coordination du suivi des patients et de l’échange d’informations entre les professionnels se sont améliorés. Cela forge de bons réflexes dans la surveillance des traitements. La télémédecine est d’un recours important concernant les suivis gériatriques, notamment avec les personnes âgées atteintes de démence. Cette démarche nous permet d’éviter de transporter le résident, ce qui est source de forte déstabilisation, mais aussi d’être là pour l’aider à expliquer sa situation et le rassurer pendant la consultation. In fine, cela permet de mieux cibler le traitement pour les résidents déments. »

Michel Rioli prépare actuellement, en partenariat avec l’Assurance maladie de Vendée, une évaluation médico-économique de l’outil. Au vu de la réussite du dispositif, une extension du rayon d’action de Télémédinov est envisagée sur tout le département de la Vendée. 110 000 habitants pourraient être concernés.  

Frédérique Josse

 


La télémédecine freinée par un problème
 de financement

Le ministère de la Santé a inscrit le projet Télémédinov dans le cadre du financement de la télémédecine prévu par l’article 36 de la Loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2014. Laquelle permet de financer pendant quatre ans la télémédecine grâce au Fonds d’intervention régional (Fir) avant d’être nomenclaturée et prise en charge par la Cnam. Mais les décrets de 2014 ne sont toujours pas sortis… « Cela a donc été une année blanche, regrette Michel Rioli. L’hôpital et les Ehpad ont subventionné le projet sur leurs fonds propres… Bref, aujourd’hui, le manque de financement pour les professionnels libéraux freine le développement de la télémédecine en ville ».  


 

 

 

 


Les urgences, un passage délétère pour 
les personnes âgées

Le document intitulé « Personnes âgées aux urgences », rédigé par le Dr Nathalie Faucher
du service de gériatrie de l’Hôpital Bichat (AP-HP), récapitule les risques liés au passage aux urgences pour les personnes âgées :

1) Délais d’attente : gravité de l’état méconnu, prise en charge tardive, retard du diagnostic.

2) Isolement : troubles neurosensoriels et cognitifs, absence de proches, incapacité de comprendre la situation.

3) Risque de chute pour aller aux toilettes : troubles cognitifs, fractures, escarres.

4) Immobilisation sur brancard : pas de boisson ni d’alimentation, risque d’incontinence forcée, agitation, anxiété.

5) Environnement hostile : bruits, lumière crue et agressive, agitation.

6) Contention : majoration des troubles du comportement et de la confusion.


 

 

 

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